Prêter du sel, de la moutarde ou de la farine à la voisine est une pratique courante, mais prêter de l’eau ? C’est la curiosité qui règne à Nadéla, un village du nord Togo. Ici, l’eau est considérée comme le « sang d’un initié ». Cette expression traduit une réalité étonnante dans cette communauté.
Nadéla, situé à une vingtaine de kilomètres au sud-est de Borgou, est peuplé d’agriculteurs venus des préfectures de Tône et Cinkassé à la recherche de terres fertiles. Les concessions, distantes les unes des autres, font face à des défis d’approvisionnement en eau, accentués en cette fin de saison pluvieuse.
Quand la pénurie d’eau devient un récit : La vie à Nadéla
Guifalibe Digbandja, résidente depuis plus de vingt ans, témoigne des difficultés : « D’ici décembre, notre calvaire recommencera. Il faudra parcourir plus de 15 km pour puiser de l’eau dans la rivière Sansargou à Borgou. » Les charrettes et les ânes ont amélioré la situation, mais la pénurie d’eau persiste.
Les femmes de Nadéla se souviennent encore des jours où elles devaient parcourir plus de 30 km pour trouver de l’eau. Les charrettes tirées par des ânes facilitent aujourd’hui le transport, mais les souvenirs douloureux de la quête quotidienne d’eau avec des cuvettes sur la tête persistent.
Je me rappelle encore comme si c’était hier. Nous étions allées, mes voisines et moi à la recherche de l’eau à Borgou. Au retour, une fois dans ma cour, j’ai glissé après avoir marché sur une noix de Karité. Je suis tombée et la cuvette d’eau s’est renversée. Je venais de perdre le butin d’une demi-journée de labeur après avoir parcouru plus de 30 km en aller-retour.
Hommes et bête assoiffés espéraient mon retour avec impatience. Je suis restée, un long moment, à terre, la tête entre mes mains, regardant, impuissante, le sol s’abreuvé de ma sueur » raconte Sinongou Soampa, la quarantaine. J’ai pû faire la cuisine ce jour-là grâce à ma voisine qui m’a prêté un bidon d’eau » ajoute-t-elle.
Les hommes du village soutiennent les femmes dans cette quête. Natondja explique qu’avant l’arrivée des charrettes, ils transportaient de l’eau sur des vélos. Aujourd’hui, malgré les améliorations, la corvée d’eau reste quotidienne en saison sèche.
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Bien que le village ait bénéficié d’un forage pour l’école il y a deux ans, l’eau n’est pas suffisante pour la population. La pénurie d’eau expose les habitants aux maladies hydriques et pose des défis aux éleveurs. En attendant des projets potentiels de l’État ou d’ONG, les villageois continuent de porter leur fardeau.